vendredi 5 octobre 2012

L'Aveuglement national

C’est une évidence que tous les pays, qu’ils soient démocratiques ou pas, souffrent de l’aveuglement en ce qui concerne leurs propres défauts.  Même s’il s’agit d’un pays avec une longue tradition de liberté d’expression, comme la France ou les États-Unis, il n’est pas humainement possible d’être tout à fait reconnaissant de ce qui ne marche pas dans sa propre société.  Beaucoup de Français se plaignent du comportement des syndicats, par exemple.  Mais si un étranger, en l’occurrence un Américain, pointait du doigt le pouvoir des syndicats en France et suggérait que ce pouvoir pourrait gêner la croissance économique, c’est possible que les Français, quelque soient leurs tendances politiques, s’en offusquent.  De même, bien que je sois tout à fait contre le port des armes, estimant que le droit illimité aux armes qui existe ici contribue fortement au taux de criminalité dans notre pays, je ressens un peu de colère quand les étrangers, en l’occurrence les Français dans des commentaires laissés sur lefigaro.fr par exemple, nous critiquent pour notre engouement pour les armes à feu.

En tant qu’écrivain toujours sur le qui-vive pour des points communs entre votre pays et le mien, il m’est très réconfortant de savoir que notre aveuglement national en ce qui concerne la dette souveraine est en grande partie partagé.  Donc j’espère ne pas vous blesser dans l’amour-propre si j'en parle.

Et la France et les États-Unis dépensent plus d’argent qu’ils ne reçoivent en impôts.  Mais tant qu’il y aura des créanciers disposés à nous prêter l’argent dont nous avons besoin pour alimenter nos machines à allocations sociales (et de ce côté de l’Atlantique, nos forces militaires), nous n’arriverons jamais à ramener notre endettement à zéro. Nous faisons croire, tous les deux, que nous sommes tout à fait conscients du danger que pose la dette ; des deux côtés de l’Atlantique les journalistes, économistes, élus, etc. ont été nombreux à tirer la sonnette d’alarme quant au sort qui nous attend si l’on n’en fait rien.  C’est une espèce d’aveuglement, je pense, qui nous a empêché jusqu’à présent de tenir le taureau par les cornes.  Comment pourrait-il en être autrement ?

Mais si nous souffrons du même aveuglement en matière de dette, nos systèmes économiques et sociaux respectifs causent une certaine incapacité de voir les bonnes solutions pour la payer.

Le capitalisme néo-libéral qui s’est peu à peu installé dans mon pays ces dernières années interdit toute augmentation d’impôts qui, elle, puisse renflouer les caisses de l’état et donc assainir nos comptes publics.  Les républicains ne veulent rien entendre sur ce point, mais les démocrates ne sont pas beaucoup mieux non plus.  Ce qui plus est, nous avons beaucoup de vaches sacrées dans notre budget, dont les dépenses militaires et l’assurance santé pour les seniors.  Ces dernières menacent de faire exploser notre dette souveraine.

En revanche, l’exception française consiste à taxer et taxer encore, et c’est clair que la situation ne va pas s’améliorer sous la majorité actuelle.  La stratégie du gouvernement est d'imposer les entreprises et les contribuables, quitte à faire quitter le pays les détenteurs des plus grandes fortunes.  En même temps, il reste à voir si le gouvernement mènera jusqu’au bout son projet de réduire les dépenses de l’état.

Pas étonnant alors que le taux de croissance français reste obstinément à zéro.

J’ai toujours cru en un pays idéal qui applique les meilleurs aspects de votre système étatiste et notre système individualiste.  Vu notre aveuglement national, je ne crois pas que ce beau pays imaginaire puisse naître.

1 commentaire:

  1. Je n'ai pas tout lu de lui mais Ron Paul semblait être un bon candidat (mais je me plante peut-être).

    Je pense que nos pays sont les plus proches à bien des égards si ce n'est le langage et pour parler franchement la France comme les USA font parti d'une alliance tri-partie avec les Anglais qui domine le monde par sa puissance militaire/stratégique/politique.
    Nos pays ont donné naissance aux institutions financières qui nous nourrissent d'argent virtuel depuis une cinquantaine d'année permettant à notre alliance et à nos alliés de continuer à nourrir cette bête qui sursoit à notre croissance.

    Tirer régulièrement la sonnette d'alarme sur le fait que nous devons rembourser 'la dette' permet de jouer sur les salaires, les impôts, le taux de chômage, le prix des aliments etc etc..

    Ce n'est qu'un levier supplémentaire dans cette belle machine capitaliste qui s'est emballée aux mains de gens qui ont peu de scrupules.

    Pour ma part je rêve d'un pays où les gens banniraient la médiocrité et la petitesse.
    Un pays où le travail serait un moyen d'émancipation, un pays où les classes moyennes tireraient leçon du passé et ne croiraient pas voter pour un nouveau messie tout les cinq ans, où le peu de temps qu'ils ont à vivre ne serait pas gâché en tâches abrutissantes, avilissantes et souvent dénuées d’intérêt, juste suffisantes pour pouvoir acheter les quelques produits de piètre qualité produits au loin par des mains juvéniles.

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