jeudi 29 mars 2012

Leçon d’anglais



Vous employez le terme « far west » (ouest lointain) pour designer la période historique américaine qui s’est déroulée au 19e siècle.  Les journalistes français s’en servent aussi pour décrire les fusillades et d’autres atteintes à l’ordre public.

Je me dois de vous informer que si vous utilisez ce terme en Amérique, on ne saura pas de quoi vous parlez.  Par contre, si vous dites "old west" (vieil ouest) ou "wild west" (ouest sauvage), vous ferez preuve de votre authenticité et respect pour nos vieilles traditions.

mardi 27 mars 2012

Relations franco-ibériennes : la colère de vos voisins



Beaucoup de monde commente l’actualité sur les sites des journaux de tous les pays du monde. (j’ai déjà commenté le caractère des réactions que l'on trouve sur lefigaro.fr et d’autres journaux français : http://relationsfranco-americaines.blogspot.com/2011_08_01_archive.html)  Puisque l’anonymat de l’internet permet le libre-échange et des idées et d’émotions, on remarque parfois de l’emportement dans les réactions des lecteurs, qu’il s’agisse du New York Times ou du Parisien.  Cela arrive à tout le monde.

Il y a pourtant des choses marquantes dans les commentaires laissés sur le site du journal espagnol réputé El País.  Dans un premier temps je dois remarquer que la charte de participation de ce journal espagnol serait a priori moins stricte que celle qui gouverne la plupart des journaux français.  Cet exemple nous le montre : "Yo sabia que eras tonto, lo que no sabia es que ademas eres marica."
(Je savais que tu étais nul, j’ignorais que tu étais pédale aussi.) Ça va de soi qu’un tel commentaire serait supprimé s’il s’agissait du Figaro, je pense.

Certes, on n’a pas à chercher longtemps pour trouver du sarcasme et du mépris sur lefigaro.fr.  En réaction à l’article titré « Sarkozy se présente comme le candidat de la sécurité », des internautes ont écrit :

Candidat de la sécurité ?
Alors vivement qu'il soit élu !
Mais... ça ne fait pas 10 ans déjà qu'il est responsable de la sécurité ? Ah d'accord, c'est comme pour le pouvoir d'achat et la République irréprochable : c'est pour rire.

Quand on pense que le PS veut en revenir à la police de proximité dont on sait combien elleétait inefficace et couteuse.
J'ais (sic) eu l'occasion de la dénoncer , lors de plusoieurs (sic) réunions du comité local de prévention et de sécurité de ma ville.

Compte tenu qu’il y a sans doute eu des lecteurs français qui auraient tenté d'enregistrer des commentaires pareils à celui que j’ai tiré de El País, j’ai observé un ton chez les internautes de El País qui est quand même remarquable. C’est-à-dire ils adoptent presque tous un ton de désespoir et de colère.  Une colère qui correspond à un taux de chômage qui a atteint 23 % et pour les jeunes, 43 %.  Une colère qui est compréhensible dans un pays où un habitant sur cinq vit sous le seuil de pauvreté.  Lisez ces commentaires :

"Todos sabemos que la economía española esta muy mal y no tiene pinta de que se arregle pronto, si queréis ganaros algún dinero extra clic aquí: http://goo.gl/hboLK Esto vale realmente la pena, no se pierde nada por intentarlo: http://goo.gl/Cee1Q Y en esto también se puede ganar algún dinero: http://goo.gl/6irt3".

Tout d’abord, je vous déconseille de cliquer sur les liens dans ce commentaire.  Car en voici la traduction :
« Tout le monde sait que l’économie espagnole est en très mauvais état et il ne me semble pas qu’elle se redresse bientôt.  Si vous avez envie de gagner un peu de fric cliquez ce lien : ...  Ça vaut le coup, car on ne peut rien perdre en se renseignant là-dessus.  Essayez ce lien aussi : ... »

"este RAJOY era el que decia que nos iban a respetar,lo que dan son ganas de llorar"
Traduction :  « C’était (le président) RAJOY qui justement promettait de nous faire respecter (à Bruxelles, auprès des autorités européennes), ils (la BCE, la Commission européenne) ne font que nous faire pleurer ».

No hay control solo destrucion (sic) de la economia de puestos de trabajo de bienestarsocial,hay que preguntarse estos ppodridos (sic) tienen capacidad para arreglar esta situacion????

« Il ne s’agit pas d’un « contrôle » (budgétaire), ce n’est rien que la destruction de l’économie, des emplois, de bien-être social, il faut se demander si ces pourris sont vraiment en mesure de régler la situation. »

Ces réactions sont semblables aux messages de détresse, jetés à la mer électronique par des naufragés de la zone euro.


mardi 20 mars 2012

Je me reconnais en lui



Il aurait qualifié son homologue espagnol, José Luis Zapatero, de ne pas être très intelligent.

Quant à moi, je me crois, de temps à autre, plus intelligent que ceux qui m’entourent, pour peu que mon avis soit justifié. Ça m’arrive et je n’en suis pas fier, voilà. Parfois c'est seulement la pudeur et le respect d'autrui qui m'empêchent de faire une bourde.  Je n’aurais jamais la hardiesse qu’il a eue.  Cela ne veut pas dire que je n’ai jamais eu les mêmes idées que lui vis-à-vis de certains interlocuteurs.

Il a prononcé la phrase malheureuse « Casse-toi pauv’con » à une personne qui a refusé de lui serrer la main. Ça, je ne l’aurais pas dit.  J’aurais plutôt baissé le regard, j’aurais rougi, sans rien dire.  J’aurais trop réfléchi aux conséquences de la franchise.  Sachez, pourtant, que les mots que j’aurais aimé dire auraient été à peu près les mêmes que les siens.

Plus récemment, lors d’une visite à un CFA à Lille, il a lancé : « J’aime bien ces jeunes, ils sont normaux, pas comme ceux de Sciences po ». Ce malgré la présence d’une dizaine de diplômés de cette prestigieuse école dans son équipe de campagne.  Cette citation m’a fait éclater de rire.  Puis l’honnêteté m’a ensuite obligé d’avouer que le désir de me faire aimer m’a fait, plus d’une fois, lâcher de pareilles bêtises.  J’ai eu de la chance de ne pas être candidat aux présidentielles, entouré de micros, et que les bêtises dont je parle aient été dites bien avant l’âge de l’internet.

Je ne le défends pas.  Je comprends votre déception, votre colère, voire votre mépris et votre haine.  J’estime d’ailleurs que les autres prétendants à la présidence, que l’on soit d’accord avec eux ou pas, aiment la France autant que lui (M. Hollande y compris) et sont, pour la plupart, sérieux.

Je n’ai parlé que de ses faiblesses et je n’en ai même pas fait une liste complète.  J’ai évité de parler de ses vertues, non pas parce que vous diriez qu’il n’en a pas, mais parce que les siennes et les miennes (si j’en ai) ne seraient pas les mêmes.  Il serait à la fois prétentieux et inutile de tenter de les comparer.  En outre, j’ai déjà évoqué trois points communs entre un particulier américain et le président de la République française.  Ça devrait suffire.


mardi 13 mars 2012

Le plus beau mot de la langue française

Votre langue possède beaucoup de très jolis mots.  Voici une liste non exhaustive des mots ne manquent jamais de susciter un frisson chaque fois que je les entends : intégralité, printanier, inéluctable, rossignol, gentillesse, coccinelle et n’oublions pas amour.

Cependant, pour moi le mot français le plus beaux de tous est l’adverbe/pronom personnel en.

D’une distance de 5 000 kilomètres je peux vous entendre ricaner.  De tous les mots du richissime vocabulaire de la langue française, qui est ce nul qui a choisi « en » comme favori ? 

Je m'expliquerai.  Prenons l’exemple de cette phrase : « J’ai tant aimé ce livre que j’en ai lu l’intégralité en un seul jour. » Ce n’est peut-être pas la plus jolie phrase que l’on puisse citer, mais elle démontre quand même assez clairement l’équilibre qui est, à mon avis, ce qui distingue le français des autres langues.  « Livre...en ai lu...l’intégralité » : trois références à l’idée de « livre » dans une seule phrase ; la première au début, la seconde au milieu et la dernière vers la fin.  Donc une phrase équilibrée, logique, parfaite.  Le pronom « en » en est l’axe.

À part le fait que le français m’est une langue étrangère, et on a toujours la tendance à idéaliser tout ce que l’on voit de loin, l’équilibre du français - moins évident dans l’anglais-américain contemporain je crois - ne cesse de m’émerveiller.  D’où mon enthousiasme pour votre langue (et son très riche vocabulaire).

samedi 10 mars 2012

François Hollande, rassembleur


François Hollande est censé être le plus rassembleur des candidats aux présidentielles, mais pourra-t-il l’être une fois élu ?  Rappelez-vous que la campagne électorale de notre président Obama n’a fait que farder le clivage droite-gauche en Amérique.  Vous qui suivez la politique américaine savez bien que la droite a fait semblant de dormir en début du mandat, tout en guettant le nouvel élu.  La guerre civile sans armes que nous subissons en Amérique a repris de plus belle une fois la lune de miel terminée.  Peu importe qu’Obama ait remplacé un président détesté.  « Un président détesté », ça vous rappelle quelqu’un ?

jeudi 8 mars 2012

Réfléchissez bien avant d’agir

On a très récemment proposé de changer certaines règles grammaticales françaises, de sorte que le masculin ne l’emporte plus sur le féminin.  C’est possible que vous puissiez apprécier cette perspective de la part d’un ami américain.  Nous avons déjà vécu cette controverse.

Inquiétés du sexisme qui lui aussi était inhérent à la langue anglaise, s’agissant plus précisément des pronoms personnels dans notre langue, nous commencions pendant les années 1970 à nous servir du pluriel quand même il s’agissait d’un seul individu.  (En anglais le pluriel n’indique pas le sexe de la personne ou chose concernées, tandis que le singulier, lui, si l’indique.
Anglais : give it to her (féminin singulier) ; français : donne-le-lui ; give it to them (pluriel) ; donne-le-leur) .  Par exemple, cette phrase en français « Si l’on vous présente à une personne âgée, il faut toujours être respectueux. » se traduirait ainsi en anglais-américain contemporain : “When you’re introduced to an older person, be polite to them.”

Autrefois, on aurait plutôt dit “When you’re introduced to an older person, be polite to him (lui, masculin singulier).”  Le pronom him voulait dire « tout le monde ».  Or on se rendait compte vers 1970 que « tout le monde » comprenait aussi le sexe féminin, du coup “him” était mal adapté.  Il fallait trouver un subtitut pour “him”, mais il n’y en avait pas un.  On convenait donc du pluriel “them” ou “their” (pronoms pluriels) pour indiquer une personne ou des personnes, peu importaient leur sexe et leur nombre.

Le problème semblait résolu.  Sauf qu’en utilisant désormais un pronom pluriel pour faire référence à une seule personne, on misait sur une logique grammaticale tordue qui par ailleurs sonne assez mal à l’oreille et ne fait aucun sens.