samedi 14 novembre 2015

Des questions

Le bilan : lourd.  Le choc : total. Les expressions de condoléances de la part des leaders mondiaux : sincères et tout ce qu’il faut dans les circonstances actuelles.

Pourtant, il y a des questions troublantes que je ne peux m’empêcher de me poser. Est-ce que c’est question de si une telle chose pourrait se passer en France, ou de quand ? Comme la plupart des occidentaux, je suis écœuré par les attentats d’hier, mais je n’en ai pas été surpris. Dans la foulée, les réponses officielles, seront-elles à la hauteur ? Ou s’agira-t-il du même débat stérile : pas d’amalgame pour la gauche, des appels à la reconduite à la frontière pour l’extrême droite, réponse floue pour la droite dite
« républicaine » ?

Puisqu’aux États-Unis nous n’avons pas été victimes d’une attaque terroriste de grande ampleur depuis 2001, cela signifie-t-il que nous en sommes protégés ?

Je me range du côté des présentes victimes des attentats du 13 novembre 2015.  Mais je dois aussi prendre conscience des futures victimes de tels attentats, dans l’espoir qu’il n’y en ait pas. À cet effet, de très gros problèmes non seulement sociaux, mais de valeurs devront se résoudre. Ce serait un casse-tête pour n’importe quel gouvernement, qu’il soit de gauche ou de droite.

jeudi 16 juillet 2015

La Réforme de l’école en permanence : vouée à l’échec

Å mon avis la réforme de l’école ne sert qu’à une chose : l’enfumage.  

Des deux côtés de l’Atlantique (mais particulièrement chez vous) l’école était jadis l’un des piliers de la société.  Aujourd’hui elle n'est plus malheureusement que la vitrine des maux de celle-ci. Il était une fois, l’école acculturait et assimilait (deux gros mots et en anglais et en français) ; elle était respectée. À nos jours l’école se voit obligée de s’incliner devant l’inculture et le rejet des repères communs.  Elle fonctionne, tant bien que mal, dans une société divisée, voire fracturée, ce qui veut dire souvent qu’elle n’arrive plus à réaliser sa mission.

L’école donc doit être réformée.

Et pourtant, malgré la lente dégradation de l’école (depuis 1968, il faut préciser), le ciel ne nous est pas tombé sur la tête.  La jeunesse française et américaine en sort suffisamment bien préparée pour...s’exiler en Angleterre ou au Canada  ou s’inscrire à Pôle emploi (s’agissant de la France) ou s’installer chez ses parents parce qu’il n’y a pas de travail assez bien payé (s’agissant des USA).  Mais nous restons respectivement la première et la cinquième puissances mondiales, tout comme pendant les Trente glorieuses. Comment l’expliquer ?

Dans un premier temps, les classes supérieures française et américaine tirent leur épingle du jeu.  Elles se réfugient dans l’école privée et pratiquent la ségrégation résidentielle, laquelle leur permet d’inscrire leurs enfants dans une meilleure école publique.  Elles ne pâtissent pas de l’inégalité des richesses qui sévit aux USA (mais de plus en plus en France aussi) - loin s'en faut : ce sont elles qui en bénéficient.
  

Cependant, L’Amérique et la France marchent malgré tout (tout comme les écoles près des meilleures adresses).  Les élites française et américaine ne sont peut-être pas à la hauteur des défis qu’elles doivent, d’une façon ou d’une autre, surmonter, mais elles gèrent nos beaux pays beaucoup mieux que la grande majorité des classes dirigeantes.  Autant dire que l’école fonctionne suffisamment bien pour éviter l’effondrement de la société. Dans un monde où il y a très peu de sociétés saines, ce n’est pas rien. 

Deuxièmement, la précarité n’est pas seulement la faute de l’école, elle est due plutôt à la mondialisation.  Si les fleurons de l’industrie française se font acheter par de grands groupes internationaux, l’école n’y est évidemment pas pour rien. Si la précarité nuit aux résultats scolaires, il faut chercher ailleurs que l’école pour trouver la solution. 

Quand nos élèves sortent de l’école, ils savent compter et lire assez bien pour se débrouiller dans un monde qui ne cesse de se transformer.

Les décideurs de la France (majoritairement diplômés des grandes écoles) et les USA (majoritairement diplômés de notre fameuse Ivy League) s’inquiètent de la condition de l’école. Ils veulent y porter remède. Mais chaque projet censé améliorer l’école finit par l’affaiblir (la récente réforme du collège en est un bon exemple). 

Pourquoi ?  Ils se refusent à voir que l’école n’est pas un problème pédagogique, mais sociétal.  Je ne sais pas comment il en est en France, mais aux USA les classes favorisées vivent à l’écart de la société.  Elles ont du mal à se faire une idée de la détresse qui afflige non seulement les classes populaires, mais la sacro-sainte classe moyenne.  On a donc tendance à prôner la solution technocratique là où la solution humaine serait plus efficace à long terme.  D’où la réforme des rythmes scolaires à l'école (France) et la remise à plat des examens de compétence en maths et lecture (USA). Il s’agit du bricolage éducatif.   

On ne peut faire état de la maladresse de la plupart des réformes scolaires sans remarquer que celles-ci aussi tendent toujours à tirer vers le bas. Ce n’est pas que la faute aux élites ; la société entière y est pour quelque chose.  Depuis les années 1970 on croit de plus en plus en la délicatesse de l’enfant.  Lui exiger beaucoup, c’est lui demander trop. La difficulté que posent certaines matières porte atteinte à la dignité de l’élève.  L’estime de soi l’emporte sur l’acquisition des connaissances de base. Qui plus est, l’excès de respect envers l’élève est même devenu une sorte de peur. Imposer trop de discipline à l’élève et ce dernier va se rebiffer, ou pire.

Aucune réforme scolaire ne réussira avant que l’on ne se débarrasse de ces notions nocives et erronées. 





jeudi 9 avril 2015

Pour sauver le monde, imposez le français comme langue universelle

Je suis fier d’être américain.  Je suis sensible aux défauts de l'Amérique tout comme à ses vertus, mais je n’en reste pas moins convaincu de l’exception américaine.  L’Amérique continue à attirer des gens des quatre coins du monde (dont la France).  Nulle autre société dans l’histoire n’a réussi à rassembler une population aussi hétérogène pour en faire une nation.  Je ne nie pas qu’il reste du terrain à gagner en ce qui concerne les inégalités économiques, raciales, etc., mais je suis certain pour autant que les États-Unis atteindront un jour ses idéaux.

Je reste pourtant très douteux quant à la culture anglo-saxonne et ses effets délétères qui, eux, ne cessent de se répandre dans le monde.  Les Américains et Britanniques peuvent être tout à fait aimables, mais méfiez-vous des Anglo-Saxons !


Dans tous les domaines, notamment dans les affaires, la cuisine, l’art de vivre et la culture, le rouleau-compresseur anglo-saxon cherche à refaire tous les pays du monde selon le même modèle, à savoir libéral, inégal, peu respectueux des traditions et langues locales.  L’idée anglo-saxonne est britannique, mais nous en sommes ses meilleurs représentants et en tant qu’hyper-puissance, nous sommes bien plus redoutables que nos cousins britanniques.

Une langue n’est pas qu’un système de règles grammaticales et vocabulaire, c’est l’expression d’un esprit.  Je suis persuadé que la langue française incarne le meilleur de l’esprit français, voire humain.  D'autant qu'économiquement et militairement la France ne peut faire concurrence aux Anglo-Saxons, c’est la langue et culture françaises qui doivent contrer l’influence des pays anglophones. L’humanité en bénéficierait. Vous n’auriez qu’à croire en vous.

samedi 28 mars 2015

Les Effets pervers des nouvelles technologies

La révolution numérique nous libérera (comme toutes les autres révolutions qui l’ont précédée furent censées faire).  On n’a de cesse de nous faire croire que les nouvelles technologies nous permettront de nous affranchir de toute contrainte imposée par les frontières (et, on sous-entend, celles imposées par les mœurs, les coutumes, en bref la culture bourgeoise - ou ce qui en reste).

Oui, la révolution qui est en passe de transformer, voire bouleverser la vie humaine a bien des points en commun avec les révolutions politiques et sociales de l’histoire (si ce n’est que l’histoire est désormais une matière ringarde, grâce au passage au tout numérique). Dans un premier temps, le mouvement qui commence en bas (gros ordinateurs fabriqués dans des garages par des particuliers visionnaires imprégnés de l’ambiance post soixante-huitarde qui les entoure) finit par être dirigé d’en haut (les grandes entreprises qui sont nées dans ces mêmes garages). L’essor de l’informatique est pareil, dans ce sens, à la Révolution russe.

Il ne faut pas se fier aux apparences : l’ambiance décontractée des années 1970 que le grand public croit régner chez Google, Apple, etc. n’est que la com. Il y a en fait une ligne directe entre les fondateurs des géants de l’informatique et les barons-voleurs du 19e siècle.  Les conditions de travail épouvantables dans les usines chinoises des sous-traitants d’Apple et la réponse musclée de Google face aux actions judiciaires de la part de la Cour européenne en sont la preuve.

Tout comme la révolution industrielle, la révolution numérique n’apporte pas que des maux pour autant. Si j'ai un certain niveau en langue française, ce n’est pas dû à l’école, mais à l’internet.  Ce dernier me permet d’écouter la radio française et de lire Le Figaro et Le Nouvel Obs (certes, je préfère la version papier des publications françaises et je suis chanceux d’habiter dans une grande ville américaine avec des marchands de journaux qui les vendent).  Dans toute l’histoire, on n’a jamais vu un si puissant outil pour faire répandre les connaissances et on peut facilement en profiter. 

Mais l’internet n’est pas encore arrivé à créer le paradis terrestre promis.  Il a en fait produit l’inverse de ce qu’il devait faire, dans bien des domaines (bien qu'il faille reconnaître que l’énorme majorité des usagers sont très contents de l’internet comme il est).  Voilà une liste non-exhaustive de la curieuse évolution de la Toile et les appareils qui nous permettent d’y accéder.

Chose promise : lInternet offrira libre accès à toutes les connaissances de l’humanité et les gens en profiteront pour améliorer leur condition.  Une nouvelle ère s’annonce.

Réalité : une nouvelle ère est bel et bien arrivée, mais ce n’est pas celle à laquelle on s’attendait.  Tout est disponible sur l’internet, pour le meilleur ou pour le pire, mais c’est souvent le pire qui prime.  L’internet est censé édifier, mais souvent ne fait que distraire.  On se rend compte, trop tard, que l’on a affaire å l’équivalent de la restauration rapide culturelle et non pas le second Temps des lumières.  La Toile tire vers le bas.  Ceux qui possèdent de l’érudition sont bien placés pour profiter de l’internet (chercheurs, journalistes, etc.), tandis que ceux qui n’en ont pas s’y fourvoient (extrémisme de tous bordsharcèlement, dépendance aux réseaux sociaux).

Chose promise : l’internet transformera le commerce en rendant superflu le déplacement et l’intermédiaire.  La livraison à domicile de presque n’importe quel achat est désormais possible avec le seul clic sur l’ordinateur, voire avec les « smartphone » .

Chose promise, chose due. Mais plus ça change, plus c’est la même chose. Nous sommes toujours dans l’ère sauvage du capitalisme 2.0.  Pendant les premières phases de la révolution industrielle et les premiers pas du capitalisme, les grands avalaient les petits et les ouvriers étaient exploités, au profit des barons-voleurs. À nos jours, les grands avalent les petits encore et les ouvriers perdent leurs emplois grâce aux délocalisations et la concurrence déloyale.  Le commerce sans frontières, dont l’internet est en grande partie responsable, rend possible la fabrication là où les conditions sont les plus favorables. Dans cette période ultra-libérale, cela se traduit par le déménagement des usines aux pays low-cost.  

L’internet est fait pour bénéficier le consommateur (le Roi des temps contemporains), aux dépens de tous les autres acteurs de l’économie sauf la finance. Mais aussi de la culture - l’ennemi juré de la culture (et pas uniquement la nôtre), voué à sa destruction, est la face cachée de l’internet bienveillant.  Amazon fait du chantage aux maisons de l’édition et aux librairies.  Le consommateur, qu’il soit français ou américain, y est tout à fait indifférent - l’important, c’est de pouvoir commander des livres bradés sur internet.  Il n’y a qu’un inconvénient : bientôt il n’y aura plus de librairies.  L’espace public est en passe de devenir un désert ; on en est déjà arrivé là dans certains quartiers de New York et selon plus qu’un reportage que j’ai lu, dans beaucoup de centres-villes hexagonaux.

Ce n’est pas par hasard que la plupart de ces innovations technologiques viennent de notre côté de l’Atlantique.  Depuis l’aube de l’âge industriel, les Américains n’ont pensé qu’aux avantages des inventions qu’ils créent, qu’il s’agisse de la voiture, les céréales...ou le smartphone. Aux USA, celui qui dit que le smartphone nuit à l’art de vivre prêche dans le désert.  Chez nous, l’écran est devenu le centre de l’existence, pour le meilleur ou le pire ; on n’en a cure. Telle est de plus en plus la situation en France et partout dans le monde. J’espére pourtant que vous vous révolterez contre la dictature de l’écran, étant donné que vous résidez dans le pays de la culture et l’art de vivre. On verra.

samedi 7 février 2015

Ce qu’ils ont en commun


Je suis aveugle (au sens figuré du terme), dans bien des domaines.  Je me crois pourtant assez doué en ce qui concerne la détection de la présence ou, le cas échéant, le manque d’authenticité chez les gens.

Les mots eux-mêmes ne peuvent révéler l’état d’âme d’une personne. Le vrai centre spirituel ne peut être aperçu qu’à travers le visage, les gestes et le registre de la voix.  On n’a toujours pas l’intention de tromper en parlant, mais les mots souvent brouillent les pistes, en quelque sorte. 

En général je doute des bénéfices à long terme de l’internet et les nouvelles technologies pour la société (bien que ce soient eux justement qui vous permettent de lire ce blog !).  J’en profite pourtant pour pouvoir écouter la radio française, en particulier les discours de votre président, ceux de l’ancien président et les entretiens de Marine Le Pen. Évidemment, ce n’est pas pour faire preuve de ma cohérence personnelle en matière de politique.  C’est plutôt pour écouter des discours que j’estime authentiques. Cette qualité est par ailleurs manquante chez la grande majorité des personnalités politiques américaines.

Or, Sarkozy, Marine Le Pen et Hollande ont été accusés de tous les maux qui existent.  Mais lorsque je les entends parler, je suis convaincu qu’ils croient à ce qu’ils disent.  Ça compte pour quelque chose.

Je me rends compte que vous pourriez conclure que j’ai une drôle de définition du mot « authenticité ».  Soit.

À titre de comparaison, les discours des personnalités politiques ci-dessus me font grincer les dents. J’y vois un manque absolu d’authenticité. Je n’en ai aucune preuve, ce n’est que ma conviction personnelle, qui est renforcée chaque fois qu’ils paraissent en public.




vendredi 2 janvier 2015

Fractures franco-américaines

Je viens de lire l’ouvrage de Christophe Guillet qui est paru en 2010, intitulé Fractures françaises.  Si vous en avez entendu parler, c’est fort à parier que vous l’avez oublié aussitôt, d’autant que tant de livres qui prétendent expliquer le malaise français paraissent chaque année que l’on s’y perd. Dans le seul millésime 2014, on pourrait mentionner La France, le pays que l’on abat, par Natacha Polony et Suicide français, par Éric Zemmour (on doit remarquer que ce dernier a été un assez grand succès de librairie).  Il y en a bien d'autres.

Selon M. Guillet, la France populaire a été reléguée aux zones dites périphériques.  Ignorée, voire oubliée par la classe politique au profit des banlieues, la classe ouvrière (composée et des Français de souche et des Français issus de l’immigration européenne des années 1950 et 1960) reste néanmoins majoritaire.  Principaux bénéficiaires des Trente glorieuses, les couches populaires ont été les victimes de la mondialisation et la précarité qui en est la conséquence.  Le concept de la fameuse classe moyenne est trompeur dans la mesure où la notion des zones pavillonnaires solides qui existent en opposition aux banlieues n’est elle-même plus valide. Trente ans de chômage en masse ont fait s’effriter les bases de la classe moyenne, à un tel point qu’une partie importante de cette classe vit dans la précarité.

D’une part, en tant qu’Américain, j’ai un peu de mal à comprendre la différence, s’agissant de la France, entre « couches populaires », « ouvriers » et « classe moyenne ». J’ai l’impression que ces termes font référence plus ou moins à la même chose, tandis qu’au XIX siècle la classe ouvrière et la classe moyenne étaient bien différentes l’une de l’autre.  Dans Fractures françaises, « classe moyenne » et « couches populaires » semblent interchangeables, si j’ai bien suivi l’argumentation de l’auteur.

Mais voilà l’effet égalitaire des Trente glorieuses, aux USA comme en France.  La généralisation de la prospérité a transformé la classe ouvrière et en a fait des « salariés ».  L’époque des barricades est révolue, celle du pavillon est bel et bien arrivée.

Certes, l’ouvrier français était plus radicalisé que son homologue américain et continue à l’être, même à nos jours.  Malgré un taux de syndicalisation de plus en plus faible et en France et aux USA, la France est très souvent paralysée par des grèves, tandis qu’en Amérique, la grève n’est plus qu’un exercice de théâtre. En France, les syndicats ont une influence disproportionnée par rapport au nombre réel des syndiqués.

Selon Christophe Guilluy, la France périphérique peine à se faire entendre auprès de ce que l’auteur appelle les « prescripteurs d’opinions ».  Éloignés des grandes métropoles et ignorés, dans les deux sens du terme, par « la France qui compte », les couches populaires ont pourtant un poids électoral qui s’est fait sentir en 2007 ; leur colère se traduit à nos jours par l’essor du Front national.

Nous avons notre propre « Amérique périphérique ». Majoritairement blanche et ayant plus de 45 ans, habitant dans l’Amérique profonde et inscrite au Parti républicain, cette Amérique a eu du mal à digérer l’accession au pouvoir d’Obama et ne s’enthousiasme pas non plus pour l’immigration hispanique. Le métissage continu des USA donnera du fil à retordre aux Républicains aux prochaines présidentielles.  Cependant, les circonscriptions électorales, souvent faites sur mesure pour assurer la réélection des Républicains à l’Assemblée nationale (le Congrès) expliquent, en grande partie, la défaite cuisante subie par les Démocrates aux élections de mi-mandat (en novembre 2014).  Les vieux blancs hurlent en disparaissant.