vendredi 27 janvier 2012

La Chancelière et le président

L’image ci-dessus montre l’un des pires moments de l’histoire française : l’entretien qui a eu lieu à Donchéry entre Napoléon III et Bismarck, suite à la défaite de 1870. 

Mais je ne l’affiche pas pour vous rappeler un évènement que vous connaissez déjà trop bien.

Ci-dessous est une photo de votre président actuel à la rencontre de la chancelière allemande, Mme Merkel.  Croyez-moi, mon but n’est certainement pas du tout de comparer, comme certains ont fait, Sarkozy avec Napoléon III et Merkel avec Bismarck.


Ce que je voudrais, c’est plutôt que nous imaginions la langue employée dans les deux entretiens.

Dans le cas de Sarkozy et Merkel, on peut tout simplement se servir de la logique. Merkel parle deux langues étrangères  : l’anglais et le russe. Sarkozy, lui, ne parle que son anglais qui est, selon les méchants, épouvantable. On pourrait donc conclure que les deux font de leur mieux avec leur anglais et que ce n'est pas  la langue de Shakespeare. Ce serait plutôt le « globish » qu’ils emploient ensemble.

Par contraste, s’il avait été possible d’être à l’écoute de Bismarck et Napoléon III, notre expérience aurait été bien différente. On les aurait entendu parler en français, fort probablement. Et très bien d’ailleurs. Ils auraient pu également recourir à l’anglais, que ces deux grands personnages du 19e siècle connaissaient bien.

Alors, que penser de ces deux scènes ?  Quelles conclusions doit-on en tirer ?  Devrait-on croire qu’au fil des décennies la connaissance des langues étrangères s’est dégradée ? Pas du tout.  Au 19e siècle seulement l’aristocratie maîtrisait les langues étrangères, car dans le monde à part qui était le sien, il fallait partager une langue commune.  Pour des raisons historiques, cette langue était le français.  Dans le 20e siècle, au fur et à mesure que la classe moyenne s’est élargie, que l’éducation publique s’est améliorée et que c’est devenu de plus en plus facile de voyager à l’étranger, l’enseignement des langues étrangères s’est lui-même généralisé à un tel point que la majorité de la population européenne, ou presque, possède quelques connaissances de plus d’une langue. Cependant, la mondialisation, la croissance du tourisme, l’héritage de l’Empire britannique et le triomphe du libéralisme à l’anglo-saxonne ont permis à l’anglais de devenir la langue universelle.  Le français se trouve aujourd’hui au deuxième rang.

Je me dois de remarquer que pendant au moins trois siècles, le français avait été un lien culturel qui traversait les frontières européennes, alors que l’anglais s’est propagé (beaucoup plus récemment) au travers du commerce, plus précisément du capitalisme effréné qui a vu le jour en Amérique pendant les années 80 et qui a été adopté depuis lors par les pays émergents.

Je pense que ce n’est donc pas par hasard que le chancelier Bismarck et l’empereur Napoléon III s’entretenaient en bon français pour que la France ait pu se rendre et l’Allemagne ait pu devenir une nation, et qu'en revanche Merkel et Sarkozy s’entretiennent en un anglais qui est forcément beaucoup moins élégant (du fait que Sarkozy ne maîtrise pas la langue, je le reconnais) afin de gérer une crise économique sans fin, dont les résultats éventuels sont à la fois inconnus et effrayants.

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