vendredi 8 mars 2013

Les consommateurs français et américains : dupes




L’affaire de la viande chevaline en dit long sur les changements dans la chaîne de distribution des aliments qui sont apparus ces dernières années.  La mondialisation et les pratiques industrielles inspirées du libéralisme économique dans le secteur agroalimentaire ont bien porté leurs fruits.  Il y a de quoi déplorer à l’égard d’un système qui permet n’importe quoi.  Autrement dit un contrôle aurait dû empêcher qu’une palette de viande étiquetée « viande de cheval » puisse être mélangée avec de la viande de bœuf. Tout le monde en conviendrait, je pense.

Il y a bien des acteurs de mauvaise foi dans cette embrouille et on a naturellement le droit de les fustiger.  Mais il y a un intéressé dans cette affaire dont on a relativement peu parlé : le consommateur.  Celui-ci est lui-aussi le fauteux et on devrait en être reconnaissant si l’on a vraiment envie de décortiquer les causes de ce dérapage.

Car derrière le trucage des traders, n’y a-t-il pas une certaine volonté de la part des consommateurs que les produits qu’ils mettent dans le chariot soient les moins chers possibles ? Peu importe que leurs grandes marques adorées déménagent leurs usines aux pays où le coût de travail est moindre. Peu importe qu’ils soient désormais précarisés, voire marginalisés en raison du chômage engendré par ces mêmes déménagements.  Ça se bouscule au portillon de Walmart aux USA - employeur privé numéro un des USA par ailleurs, où la plupart des produits (de mauvaise qualité) sont de provenance étrangère.  L’Américain moyen est content qu'il puisse remplir son chariot chez Walmart. Il faut souligner que Walmart est souvent mis en cause pour imposer des conditions de travail que l’on pourrait désigner poliment difficiles, pour ne pas évoquer les conditions de travail affreuses chez ses fournisseurs au Cambodge, etc.

(Si vous résidez aux USA, c’est probable que vous habitiez la côte est ou ouest du pays ; vous répondriez que vous n’êtes pas concerné parce que vous ne faites pas des emplettes chez Walmart - détrompez-vous :  les vêtements que vous-même achetez chez J. Crew ou Eileen Fisher sont fabriqués au Bangladesh, au Pakistan et en Chine, avec un rapport prix-qualité scandaleux.  Il en va de même pour l’électroménager, les chaussures, les équipements de ski, quoi que ce soit.)

Les Français devraient se reconnaître dans ce portrait de consommation à la dérive, d’autant que vous-mêmes êtes fous des magasins « hard discount ».  Toute la problématique de l'hypermarché se résume sur l’étiquetage typique d’un pot de miel :  « Mélange de miels originaires et non originaires de
la CE ».  Autant dire que votre miel vient de n’importe où. Et qui s’en alarme ? Personne, à part quelques partisans de l’artisanat alimentaire, dont les voix sont nettement minoritaires.

On ne s’étonne pas que nous soyons si dociles, ne connaissant qu’une révolution dans notre histoire.  On attendait un peu plus des Français que des brûlages de pneus devant des usines destinées à fermeture.